Le ministre néo-brunswickois de l'Éducation réagit de façon « hâtive » en soupçonnant l'Institut Confucius de servir de véhicule à de l'ingérence chinoise dans les écoles de la province, selon un ancien ambassadeur du Canada en Chine.
« Franchement, je ne pense pas que le Nouveau-Brunswick soit une cible primordiale sur le plan de l'espionnage de la part des Chinois », dit Guy Saint-Jacques, qui a été ambassadeur du Canada en Chine de 2012 à 2016.
Qu'est-ce que l'Institut Confucius?
L’Institut Confucius est un établissement public à but non lucratif qui vise à faire des partenariats avec différentes instances académiques et gouvernementales dans le monde. Il a fait son entrée au Nouveau-Brunswick en 2008.
Le programme financé en grande partie par le gouvernement chinois promeut la culture et l’enseignement du mandarin. Au Nouveau-Brunswick, 28 écoles anglophones accueillent une douzaine d’enseignants de l’Institut Confucius.
Guy Saint-Jacques rappelle que les activités de l’Institut Confucius sont déjà surveillées par le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).
Plus tôt cette semaine, le ministre de l’Éducation du Nouveau-Brunswick, Dominic Cardy, a qualifié les enseignants de l’Institut Confucius en poste dans la province de représentants du Parti communiste chinois, et affirmé qu’il comptait retirer cette organisation des écoles et du gouvernement.
Des conséquences aux déclarations du ministre
L’ex-ambassadeur redoute que le Nouveau-Brunswick subisse les conséquences des insinuations du ministre.
La décision du ministre Cardy était peut-être un peu hâtive, dit Guy Saint-Jacques. Le diplomate croit que M. Cardy aurait dû solliciter l’avis d’intervenants au ministère canadien des Affaires étrangères.
Je pense qu’il aurait été important pour le ministre de parler avec les gens à Ottawa, parce ça risque aussi d'envenimer une situation bilatérale entre le Canada et la Chine qui est déjà très tendue, soutient-il.
Le Nouveau-Brunswick a des intérêts économiques en Chine. Je ne sais pas si le ministre [Cardy] est au courant, mais il y a une trentaine d’écoles canadiennes qui offrent le curriculum du Nouveau-Brunswick. Il y a beaucoup d'enseignants qui proviennent du Nouveau-Brunswick qui travaillent en Chine. Tout ça crée beaucoup d'emplois, dit M. Saint-Jacques. Ça assure aussi une source d'étudiants chinois qui parlent anglais, pour venir étudier ensuite à Moncton et ailleurs au Nouveau-Brunswick et dans les provinces maritimes.
Institut Confucius : un service difficile à remplacer
Les instituts Confucius peuvent servir à d’autres fins, concède M. Saint-Jacques, mais en même temps ça offre un service qui n'existe pas ailleurs, qui sera difficilement remplaçable.
Idéalement, les gouvernements provinciaux et leurs ministères de l’Éducation devraient investir davantage dans l’enseignement du mandarin, croit l’ancien ambassadeur. La Chine est un pays incontournable avec lequel on va devoir continuer d'avoir des relations, déclare-t-il.
Il comprend que les contraintes budgétaires rendent la chose difficile, mais croit que les instituts Confucius prodiguent un service important, s’ils sont bien encadrés.
Bien sûr, dans les instituts Confucius, les étudiants ne vont pas entendre parler des questions controversées reliées à Taiwan ou aux droits de la personne, dit-il.
M. Saint-Jacques suggère de bonifier les cours de langues de ces instituts par des cours complémentaires pour donner un autre point de vue sur des questions cruciales. De cette façon, au moins ils vont apprendre la langue, et ensuite ils vont avoir la capacité de compléter leur formation en allant chercher d'autres informations ailleurs, affirme-t-il.